FEUILLETER UN AUTRE NUMÉRO
Mois
Année

2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
CHERCHER SUR LE SITE
 
ILS / ELLES
 
LIVRES
 
IMAGES
 
Au fil des jours...
 
Chroniques
La chapelle aouniste et son mentor


Par Jabbour Douaihy
2009 - 06
De dimanche en dimanche, le journaliste et romancier Mohamed Abi Samra a consacré sa page du Nahar, «?Miroirs de la situation?», à des témoignages de dissidents du mouvement aouniste, ce qui ne manquait pas de provoquer régulièrement, le lendemain, à la réunion hebdomadaire du bloc parlementaire du Changement et de la Réforme, l’ire du Général qui s’en prenait sans trop de nuances au quotidien de Ghassan Tuéni. Mais Abi Samra ne se le tient pas pour dit et le voilà qui réunit ces textes, enrichis de nouvelles remises en question du tortueux périple politique du Courant patriotique libre par d’autres anciens militants, le tout escorté par une petite étude sous le titre, «?La Chi’a (entendez chapelle) aouniste au miroir de la société et du peuple chrétiens?» de Waddah Chrara, grand sociologue de l’histoire politique contemporaine libanaise, et précédé par un préambule des deux auteurs qui essaient de définir leur entreprise?: «?comprendre?» ce que signifie l’homme, l’obédience de son public et son approche à travers les phases par lesquelles sont passés ses fidèles, de l’alignement partisan à la rébellion, la critique et la remise en question, voire le passage dans le camp opposé. Waddah Chrara essaie d’inscrire le «?phénomène?» Aoun dans les aléas de l’histoire des chrétiens du Liban pendant les trois dernières décennies. Sans trop de clarté à vrai dire, tant les retournements aounistes sont toujours à l’œuvre même après la sortie du livre et la publication des témoignages qui viennent de militants du premier «?éveil?» aouniste (1988-1990) comme de la deuxièmes mouture (1994-2005), certains ayant rompu tout lien avec le mouvement tandis que d’autres y bataillent toujours, même à contrecœur et ont préféré garder l’anonymat.
Parmi les vétérans, Najib Zouein, à l’origine membre de feu le Tanzim maronite, rappelle le reniement de tous les principes de départ et la domination des opportunistes au CPL, ce qui l’a amené à déserter avec d’autres camarades avant même le retour d’exil du Général. «?Vendeur de colère et de haines?» en dit assez comme titre pour les confessions d’un général à la retraite qui avait aussi participé aux premiers combats de Aoun. Parmi la deuxième génération de militants, un universitaire retrace avec lucidité la frustration de ceux qui ont assisté à la «?résistible ascension?» de Gebran Bassil dans une hiérarchie obéissante au chef qui souffle partout le feu de la «?colère sacrée?» (entendez rancunes et rancœurs) tandis que Abdallah Khoury, ancien responsable aouniste du Metn-Nord, a préféré fuir la tentation dictatoriale distinguant entre le «?public innocent?» et la cour aouniste intrigante sans foi ni loi. «?Le tueur des rêves?» et «?Le chef-père dévore ses enfants?» sont deux témoignages sur les vaines tentatives de l’opposition interne au CPL à faire respecter un début de démocratie ou instaurer un débat de fond sous le règne sans partage du leader inspiré. En contrepoint, la défense de Gebran Bassil prétend hâtivement, comme tout ce que Aoun et ses fidèles font dans leur course effrénée, que la fameuse feuille d’entente signée avec le Hezbollah a suffi pour «?libaniser?» le parti khomeyniste?!!

Un livre-document sur un phénomène dont on pourra très bientôt, avec les élections du 7 juin, mesurer le véritable impact en région chrétienne, surtout que les alliés du Général et leurs supérieurs hiérarchiques à Téhéran n’ont pas laissé de doute sur l’enjeu du scrutin?: le Hezbollah au gouvernement pour élargir l’espace de la confrontation avec l’Occident et Israël. Un air familier quand même. Aux urnes citoyens?!


 
 
D.R.
 
BIBLIOGRAPHIE
Les masques du sauveur de Mohamed Abi Samra, an-Nahar, 2009.
 
2020-04 / NUMÉRO 166