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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Par G.M.
2010 - 06
«Rue peut la littérature devant les grands malheurs ? Rien, mais surtout pas se taire. Avec nos morts, avec nos mots, nous qui sommes revenus du déluge de pierre, écrivons pour trouver une place dans le monde des vivants. » Ainsi parle Lyone  Trouillot, qui vit à Port-au-Prince et qui a tenu pendant une semaine sur le site du magazine français Le Point le carnet de bord de l’immédiat après-séisme. Lignes sèches mais poignantes, poignantes sans doute parce que sèches. Car si « on ne peut pleurer tant de morts en même temps », on ne peut pas non plus « choisir dans le tas ». Les maisons aussi sont mortes, « les maisons aussi ont de drôles de façons de mourir », et il sera difficile de se faire aux nouvelles maisons qui viendront remplacer celles qui ne sont plus. Quant aux objets, on ne fera jamais le compte de ceux « qui ne font plus partie de nos paysages intérieurs ». Trouillot tente donc de tenir la chronique d’un quotidien qui ne l’est plus, et dont les repères et les gestes familiers ont été ensevelis sous les décombres. Dany Laferrière a lui aussi pris la plume dans l’immédiateté du choc pour dire comment ce désastre « aura fait apparaître, sous nos yeux éblouis, une forêt de gens remarquables que les institutions (l’État, l’Église, la police et la bourgeoisie) nous cachaient ». Michel Le Bris, sur place au moment du séisme à la veille de l’ouverture de la deuxième édition du festival « Étonnants voyageurs en Haïti », raconte l’« immense clameur » qui a retenti dans la rue quand Frankétienne, le géant des lettres haïtiennes, est apparu sain et sauf malgré l’effondrement partiel de sa maison : « Le poète est vivant », entendait-on de toutes parts. Car ici, dit-il, « les poètes sont des dieux vivants ». La deuxième partie de l’ouvrage rassemble, du récit au poème, des textes de création tels qu’ils ont été produits, dans les semaines suivantes, par des écrivains et des membres de l’Atelier du Jeudi Soir. Tous ont tenté de mettre en mots l’impact de cette catastrophe, l’incommensurable souffrance et l’injonction, pourtant, de continuer à vivre et à raconter.
 
 
 
2020-04 / NUMÉRO 166