2012 - 10
C’est une femme émancipée à tous points de vue. Sa grand-mère aurait du mal à la reconnaître. Avec ses cheveux courts, ses lunettes et ses tailleurs bien coupés, elle a le look carré de celle qui sait ce qu’elle veut. Normal pour une femme d’affaires réussie qui gagne autant, sinon plus qu’un homme, dans une région du monde où c’est loin d’être la règle.
Depuis longtemps, elle prend ses décisions toute seule et gère avec brio ses comptes en banque et ses investissements financiers. C’est qu’elle n’a besoin de personne et le fait sentir à tous les hommes que tant de compétence rebute. Elle n’en a cure car énergique et efficace, elle n’a pas de temps à perdre en regrets. Ses lourdes occupations professionnelles ne l’empêchent pas d’être une citoyenne responsable qui milite pour des causes justes comme l’environnement et l’égalité des femmes. Engagée dans de nombreuses associations, elle assiste à des meetings, rédige des listes de revendications et participe même à des sit-in devant le Parlement. Cela sans compter les séances de gym, la musculation et la course à pied pour garder la forme et les voyages culturels qu’elle planifie un an à l’avance «?pour rester à jour sur le plan intellectuel?».
Mais quand la nuit tombe, que son portable arrête de sonner et que plus personne ne la regarde, elle s’adonne à son péché mignon: le feuilleton turc. Du chocolat, à défaut de rahat-loukoum, plein la bouche, elle admire les femmes captives du «?Harem du Sultan?» qui s’agenouillent devant leur maître, lui baisent le bas de sa robe et intriguent pour être admises dans son lit. Elle frissonne lorsqu’il les remarque, tremble lorsqu’il ordonne de les faire fouetter et pleure lorsqu’il les répudie. Elle s’extasie sur leurs voiles charmeurs, leurs belles robes et leurs bijoux étincelants et se languit de leur molle existence faite de ragots du sérail et de baklavas sirupeux…
Allez, il est temps pour elle de vérifier le cours du CAC 40.