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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Une jeunesse dans les camps


Par Jean-Claude Perrier
2019 - 02

Mazen Maarouf revient sur les traumas de son enfance, sans pathos, en ayant même recours à l’absurde, au fantastique, à l’humour surréaliste.

Dans ces quatorze nouvelles dont la première, la plus longue, donne son titre au recueil, Blagues pour miliciens, tout paraît possible, y compris qu’une vache entre dans un cinéma, ou que des miliciens contraignent un père de famille à leur inventer chaque jour une histoire, censée être drôle et les faire rire. À l’impossible nul n’est tenu, mais sa vie sauve et celles des siens sont à ce prix. L’un des thèmes majeurs de ce livre ce sont les rapports entre les fils, des gamins qui subissent la guerre, finissent par trouver presque normal de passer la moitié de leur temps dans des caves ou des abris contre les bombardements, voient les leurs mourir autour d’eux, et les pères, humiliés, subissant, parce que tous ne sont pas des combattants, des héros.

Mazen Maarouf est né en 1978 à Beyrouth, après que sa famille, des réfugiés palestiniens, a fui le camp de Tell el-Zaatar, celui de Septembre noir. Chimiste de formation, puis traducteur, journaliste, il s’est lancé en littérature en 2008, en publiant des recueils de poèmes. Trois, à ce jour, dont l’un, Un ange sur une corde à linge, a été traduit en français et publié à L’Amandier en 2013. Ensuite il a écrit ce premier recueil de nouvelles, en arabe, lequel a reçu «?Al-Multaqa Arabic Short Story Prize?». Il vit aujourd’hui entre Beyrouth et Reykjavik, en Islande, pays dont il a obtenu la nationalité. Ce qui n’est guère commun. Peut-être le fait d’habiter si loin du Moyen-Orient lui a-t-il fourni le recul nécessaire pour revenir sur la guerre qui a marqué son enfance comme celle de tous les jeunes Libanais, et tous les autres. 

À l’heure où la guerre a cessé, sans que pour autant le pays retrouve sa stabilité, mais où elle a embrasé le reste de la région, plutôt qu’un témoignage, Mazen Maarouf a préféré puiser dans son imagination, la faire se télescoper avec la réalité qu’il a vécue, revisitée, transcendée sans concession, de façon parfois crue, souvent drôle, voire absurde. Son livre est en cours de traduction dans dix autres pays. C’est à n’en pas douter un talent prometteur, dont on aimerait bien suivre le parcours et l’œuvre à venir, forcément atypiques.
 
 BIBLIOGRAPHIE 

Blagues pour miliciens de Mazen Maarouf, traduit de l’arabe par Bruno Barmaki, Flammarion, 2019, 170 p.

 
 
 
D.R.
Dans ces quatorze nouvelles, tout paraît possible, y compris que des miliciens contrai-gnent un père de famille à leur inventer chaque jour une histoire drôle.
 
2020-04 / NUMÉRO 166