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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Le Salon du livre de Paris à l’heure mexicaine
Le Mexique sera l'invité d’honneur du Salon du livre de Paris qui se tient du 14 au 18 mars, Porte de Versailles. Le Liban sera présent à cette manifestation qui accueille des éditeurs du monde entier et présente les dernières créations dans le domaine de l’édition numérique.

Par Georgia MAKHLOUF
2009 - 03
Après un Salon du livre 2008 en petite forme et qui avait accusé une baisse de la fréquentation de 8 % par rapport à 2007, les organisateurs espèrent que 2009 sera une bonne cuvée malgré la crise. En effet, si les Français modifient leurs habitudes de consommation, ils rognent sur les dépenses inutiles pour préserver leurs loisirs et continuent à privilégier la culture. Les musées, par exemple, connaissent une fréquentation en hausse marquée. On espère qu’ils seront donc nombreux à parcourir les stands des quelques 1 200 exposants, à acheter les œuvres des 3 000 auteurs présents ou à assister aux quelque 200 conférences proposées.

Au chapitre des nouveautés, signalons Artalivre, un nouvel espace convivial de 50 m2 dédié au livre d’art. Des rencontres y sont prévues deux fois par jour avec des éditeurs, des auteurs et des artistes, ainsi que des ateliers pour enfants ou des projections d’expositions en cours. Avec une volonté de rendre le livre d’art plus proche et plus accessible.

Le syndicat national de l’édition se propose également de poursuivre et d’amplifier la réflexion sur l’édition numérique. L’espace Lectures de dem@in, inauguré l’an dernier, sera reconduit et développé. Il permettra de faire un tour d’horizon complet des nouveaux supports de lecture numérique ; de tester les différents portails permettant un accès en ligne aux véritables puits de culture et de savoir que sont Gallica, le projet de la BNF, ou Cairn, le portail des sciences humaines ; ou encore de transformer un livre papier en livre numérique et vice-versa, grâce à des équipements ultraperformants. Les professionnels débattront des enjeux de la révolution numérique durant une journée entière, le 17 mars, dans le cadre des « Assises du Livre », avec des thèmes tels que les nouvelles relations auteurs/éditeurs dans l’édition numérique, la place des libraires dans la chaîne du numérique ou encore les politiques en faveur du livre numérique.

Gageons aussi que Le Petit Nicolas de Sempé et Goscinny, dont on fête les 50 ans, sera une des vedettes de ce Salon. Mais c’est du côté du Mexique, invité d’honneur, qu’il faudra aller faire un tour pour faire moisson de nouveautés. L’ambassadeur du Mexique à Paris rappelait récemment que son pays publie plus de 100 000 titres par an et jouit d’une grande tradition littéraire. Cette tradition, on peut la faire remonter aux sources, c’est-à-dire aux textes Maya et Nahuatl miraculeusement échappés aux flammes des évêques pendant la conquête espagnole et dont quelques-uns ont été traduits en français par... un certain J.M.G. Le Clézio.

Mais si l’on s’attache à la littérature mexicaine du XXe siècle, deux grandes figures émergent. Tout d’abord Octavio Paz (1914-1998), bien sûr, prix Nobel de littérature en 1990 et dont l’œuvre majeure est Le labyrinthe de la solitude ; puis Carlos Fuentes (1928) qui est sans doute actuellement le plus connu des écrivains mexicains. Indissociable du Mexique, de son histoire, son héritage culturel et son identité, son œuvre milite néanmoins pour le dialogue des cultures. Abondamment traduite en français et publiée chez Gallimard, elle compte romans, nouvelles et essais. On citera Terra Nostra, La plus limpide région, Christophe et son œuf, qui sont ses titres les plus connus. Fuentes a reçu de nombreux prix pour l’ensemble de son œuvre, dont le prix Alfonso Reyes, le prix Cervantès, le prix Picasso-Unesco ou la Légion d’honneur et, malgré cela, il reste encore insuffisamment connu du grand public français. Sa présence au Salon du livre sera sûrement l’occasion pour beaucoup de lecteurs de le découvrir.

Aux côtés de Fuentes, nombre d’autres écrivains méconnus en France seront invités. Certains d’entre eux sont déjà traduits, mais peu lus, tels que Homero Aridjis (1940), José Augustin (1944) ou Alberto Ruy Sanchez (1951). Aridjis est un grand poète, dont l’inspiration puise dans la mythologie grecque et les mythes précolombiens. Mais ce sont surtout ses romans historiques qui l’ont fait connaître du grand public mexicain. Ses Poèmes solaires, préfacés par Yves Bonnefoy, viennent de paraître au Mercure de France. Augustin est considéré comme un des écrivains phares de la « litteratura de la Onda », qui a introduit le rock et la contre-culture dans la littérature mexicaine des années 60. Mexico midi moins cinq, publié en français en 1993, reparaît cette année chez Métaillié. Ruy Sanchez a soutenu une thèse sur Pasolini sous la direction de Roland Barthes. Depuis, il se consacre à la littérature et l’édition. Son premier ouvrage, Les visages de l’air (1987), constamment réédité, est inspiré par Mogador-Essaouira au Maroc. Son écriture semble d’ailleurs renouer avec la tradition du conte oriental, et ses phrases sont ciselées comme les « azulejos » issus de l’art arabe. Traduit en français aux éditions du Rocher, Sanchez était récemment à Beyrouth, invité par l’Institut Cervantès.

Plus connu que ses confrères, Jorge Volpi (1968) a très vite rencontré le succès international grâce à une œuvre profondément originale. Il fait partie d’un groupe, « le crack », qui rejette la facilité des best-sellers et revendique une littérature mexicaine critique et réflexive. Le jardin dévasté parait au Seuil à l’occasion du Salon.

Enfin, on peut distinguer un troisième groupe, parmi les auteurs invités. Ceux qui n’ont, pour l’essentiel, pas encore été traduits en France et dont la venue au Salon est l’occasion, pour les éditeurs, de les publier. El Ultimo lector de David Toscana (1961)  arrive couronné de prix. Son éditeur, Zulma, présente le livre comme une fiction dans la « grande tradition du réalisme magique sud-américain des Garcia-Marquez et Juan Rulfo ». Toscana est déjà traduit en plusieurs langues, dont l’arabe, mais c’est sa première traduction en français.

José Corti saisit, lui, l’occasion de faire connaître Mots croisés de Fabio Morabito (1955). L’auteur, né à Alexandrie, est considéré comme une des voix les plus originales de la littérature mexicaine ; ses œuvres sont comme une cartographie du quotidien, qui accorde une attention inédite aux détails et aux gestes qui régissent les comportements humains. On pourra aussi découvrir Pura Lopez Colomé (1952) dont les éditions L’oreille du Loup publient le recueil de poèmes Intempéries. La jeune femme a traduit en espagnol de nombreux écrivains tels que Beckett, T.S.Eliot, G.Stein, B.Brecht ou R.M.Rilke. Ses poèmes sont traduits en anglais et elle a déjà reçu de nombreux prix. En tout, ce sont pas moins de  37 écrivains qui seront présents à Paris. Et pour ceux qui ne sauraient pas par quoi commencer, signalons que les éditions Métaillié publient une anthologie de la littérature mexicaine dirigée par F.Gaudry et intitulée Des nouvelles du Mexique.

Le Liban, qui avait boycotté le Salon l’année passée à cause d’Israël, invité d’honneur en 2008, suscitant les réserves de nombreux intellectuels libanais qui considèrent que la politique de la chaise vide ne pénalise finalement que celui qui s’exclut, est de retour. Outre le stand du ministère de la Culture, dédié à la manifestation « Beyrouth capitale mondiale du livre 2009 », le stand de la région Ile de France ('D 76) hébergera 16 éditeurs et 25 auteurs libanais (ou Libanais de coeur !). Parmi les auteurs attendus : Hareth Boustani, Issa Makhlouf, Rita Bassil el-Ramy, Michèle Gharios, Tamirace Fakhoury, Sami Toubia, Fouad Tabet, Abdo Kahi, David Hury et Nathalie Bontems, Leila Zahed, Nabil Beyhum, Anne Fakhoury, Zeina Abirached, Lamia el-Saad, Joumana Jamhoury, Joëlle Giappesi, Aurélie Carton, pour ne citer qu’eux. Une bonne vitrine de notre production littéraire, en attendant le prochain Salon du livre francophone de Beyrouth…



Georgia Makhlouf signera Les Hommes debout au stand de la Maison du livre, le 17 mars à 18h, et Le Liban et la mer (photos de Joumana Jamhoury), le 15 à 17 heures.
 
 
D.R.
 
2020-04 / NUMÉRO 166