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Les mystères de Qumrân dévoilés
Entre 1947 et 1956, bédouins et archéologues découvraient à Qumrân, dans onze grottes, des milliers de fragments vieux de plus de 2 000 ans. Pour la première fois, la Bibliothèque nationale de France organise, du 13 avril au 11 juillet 2010, une exposition entièrement consacrée aux manuscrits de la mer Morte. Un événement exceptionnel !

Par Rita BASSIL EL-RAMI
2010 - 05
C’est sous le signe de la tourmente historique que l’équipe de Laurent Héricher, conservateur en chef du département des manuscrits de la BnF, invite au voyage  le visiteur de l’exposition « Qumrân, les secrets des manuscrits de la mer Morte ». À la veille de la proclamation de l’État hébreu, dans une atmosphère belliqueuse où la tension entre Juifs et Arabes  est à son paroxysme, un pâtre bédouin exhume les manuscrits de la grotte de Qumrâm, plus connus sous le nom de Manuscrits de la mer Morte. Après de longues péripéties, les fouilles commencent sous la direction du père Roland de Vaux, directeur de l’école biblique et archéologique de Jérusalem. 900 papyrus, dont 200 bibliques, d’une importance capitale pour les juifs et les chrétiens, sont dépouillés. Remontant au IIIe siècle avant Jésus-Christ, ils sont considérés comme les plus vieux manuscrits de la Bible trouvés depuis le Xe siècle de notre ère (qui avait révélé le codex d’Alep en  910 et 930, et le codex de Leningrad en 1008). On découvre aussi des documents anciens témoignant de l’existence d’une secte inconnue, proche de la communauté des Esséniens, contemporaine des manuscrits. Les hommes y respectaient des règles strictes de pureté. Ils vivaient dans l’attente du Messie et se préparaient à la guerre : à la fin des temps, conduits par un maître de justice, ils vaincraient à tout jamais le Maître d’Iniquité... Khirbet Qumrân aura également permis de découvrir des apocryphes, écrits en grec et ontologiquement rejetés par la Bible puisqu’ils relèvent de la littérature « cachée », absente du Canon. Mais ce sont les documents en araméen, langue du Christ, qui retiennent surtout l'attention : « C’est la preuve que les plus vieux textes chrétiens ont été écrits en araméen et non en grec comme on le supposait, nous informe Laurent Héricher. La version araméenne du Livre d’Hénoch, composée plusieurs siècles avant notre ère et dont on ne connaissait que la traduction éthiopienne, en est la preuve éclatante. »

C’est l’histoire de ces manuscrits qui est présentée au public en un enchevêtrement ludique et savant de 130 pièces exceptionnelles provenant de la BnF, du Louvre et de Jérusalem, au cœur de formes  cylindrique pouvant donner aux rêveurs l’impression d’être  à l’intérieur des jarres contenant les manuscrits, enveloppés de papyrus. Le clou de l’exposition est sans doute le grand rouleau d’Isaïe aux mensurations titanesques (7 mètres de long !), le document le plus vieux et le mieux conservé, contenant de surcroît le texte complet du livre du prophète. Copié vers 120 avant Jésus-Christ, il précède l’invention de la vocalisation, et use des consonnes hébraïques ayant une valeur vocalique…

Pourquoi exposer aujourd’hui les Manuscrits de la mer Morte ? Interrogé par L’Orient Littéraire, Bruno Racine, directeur de la BnF, répond avec enthousiasme : « J’ai voulu faire connaître les manuscrits de Qûmran que nous conservons à Paris. Nous ne pouvons les exposer à la lumière que très rarement et aucune reproduction, numérique ou non, ne peut avoir la même charge d'émotion. L’exposition est aussi une manière d’entrer dans l’histoire et dans la genèse des textes sacrés du judaïsme et du christianisme. C’est une extraordinaire plongée dans nos origines. » On sort en effet ébloui de cette exposition à la muséographie attrayante qui, tout en honorant, dans un but pédagogique, les techniques de copie et le métier de scribe, nous permet d’approfondir notre connaissance de la Bible et de son contexte.…

 
 
© Michael Falter - www.facsimile-editions.com
 
2020-04 / NUMÉRO 166