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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Benguigui : « Notre langue commune est source de valeurs et de partage »
Aujourd'hui, le Salon francophone du livre de Beyrouth fête ses 20 ans. À cette occasion, Yamina Benguigui, la Ministre déléguée auprès du ministre des Affaires étrangères, chargée de la Francophonie, souligne l'importance du français en tant que langue d'avenir, en particulier pour la jeunesse libanaise à qui elle permet de tisser des liens forts à l'échelle mondiale.

2012 - 11
Madame la Ministre, que signifient pour vous les 20 ans du Salon du livre francophone de Beyrouth ? 
 
Je souhaite d’abord exprimer notre solidarité à tous les Libanais, après le deuil qui a frappé le pays la semaine dernière. Les 20 ans du Salon du livre francophone m’offrent l’occasion de transmettre le message de la France. C’est un message d’amitié dans un pays où nos liens sont si étroits, si forts. Un message de confiance dans l’avenir. Le Liban est l’exemple vivant d’une francophonie ouverte, dans un contexte plurilingue. À l’instar d’illustres écrivains comme Jean-Marie Le Clézio ou Amin Maalouf qui avaient forgé la notion de « littérature-monde en français », je milite en faveur d’une « langue-monde ». 
D’une langue française, maternelle ou choisie, langue d’exil, langue solidaire et langue de liberté, une langue française qui porte  les espoirs du monde arabe, l’utopie cosmopolite de Montréal, la créativité libanaise ou l’énergie des nouvelles métropoles d’Afrique. Une langue riche de la diversité de ceux qui l’ont en partage. Une langue d’avenir pour un monde plurilingue où la langue française et les langues maternelles puissent dialoguer ensemble.

Vous venez de participer au sommet de la Francophonie à Kinshasa, quels en sont les principaux enseignements sur la présence de la langue française dans le monde ? 
 
Nous avons répété tout au long de ce sommet qu’il y aura 750 millions de locuteurs francophones dans le monde d’ici à 2050, dont 80 % en Afrique. Le sommet s’est tenu dans le plus grand pays francophone du monde. La langue française sera demain pour l’Afrique une force dans la géopolitique mondiale. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai décidé dans mon plan d’action de mettre en place un programme, « 100 000 professeurs de français pour l’Afrique », des formateurs qui permettront à l’espace francophone de tisser des liens et de renforcer l’unité des nations.
Ce sommet a permis aussi des avancées en adoptant une nouvelle stratégie numérique francophone. Cette révolution apporte à la langue française, parlée sur les cinq continents, une plateforme mondiale d’expression, de communication, de partage, de création. C’est une opportunité d’avenir. L’outil Internet doit être le reflet de la diversité des langues. 
Le sommet de Kinshasa a également confirmé à quel point notre langue commune est source de valeurs et de partage.  Elle doit être une langue  solidaire et égalitaire, elle doit constituer le socle commun de principes démocratiques. Le président de la République française François Hollande l’a affirmé avec force et conviction.

On entend souvent que le français est en recul au Liban : quel est votre sentiment sur cette question et que peut-on faire pour y remédier ? 
 
La question est complexe et le bilan doit être nuancé. Par exemple, on sait que le nombre de locuteurs francophones est en hausse au Liban grâce, en grande partie, aux écoles scolarisant près de 65 % des élèves libanais dans des cursus bilingues francophones. Cette perception d’une francophonie en perte de vitesse s’explique par le développement du trilinguisme, mais aussi par l’évolution de l’environnement culturel. La langue française est moins présente dans les médias, dans le domaine économique, qu’autrefois. Car la majorité des francophones libanais sont arabophones et aussi anglophones, parlent parfois arménien, espagnol et de nombreuses autres langues.  
La langue française au Liban est un atout pour les Libanais car l’espace francophone est un espace en avenir. D’ailleurs, les Libanais le savent bien, eux qui sont de longue date présents dans cet espace francophone, notamment en Afrique. Il faut sensibiliser la jeunesse libanaise à l’intérêt économique et culturel de l’apprentissage du française, expliquer que c’est un atout supplémentaire que de pratiquer le français.

Quels sont à votre avis les axes d’intervention prioritaires pour consolider la francophonie au Liban ? 

Le plan d’action que nous nous sommes fixé est en adéquation avec les orientations du Pacte linguistique signé par le président libanais Michel Sleiman lors du sommet de la Francophonie de Montreux en 2010.
Quant à moi, j’aimerais, comme je l’ai dit au ministre de la Culture libanais, prolonger ces accords autour de la culture et de l’édition.
La France soutient la politique libanaise qui choisit de renforcer la francophonie à l’école, dans l’administration et dans l’environnement culturel, médiatique et économique. D’ailleurs, nous soutenons cette stratégie par un projet d’appui de 1 million d’euros et la mobilisation des équipes de notre ambassade à Beyrouth, en particulier de  l’Institut français du Liban et de ses neuf antennes dans tout le pays. Nous formons des enseignants, des avocats, des instructeurs militaires et policiers,  des responsables de bibliothèques publiques. Des rencontres professionnelles sont organisées autour de la production et de la distribution cinématographique francophone au Liban. Les 23 et 24 novembre, un séminaire international sur le plurilinguisme scolaire se tiendra à l’Institut français du Liban. Enfin, initiative très intéressante, un label linguistique trilingue dans le domaine de l’hôtellerie et de la restauration est en cours de création en lien avec le ministère du Tourisme. Ces actions démontrent que l’avenir de la francophonie au Liban est très concret.

L’avenir du Salon du livre francophone passe-t-il par un développement des supports numériques, à l’école, dans l’édition et sur Internet ?
 
Cette question sera au cœur des débats organisés pendant le Salon. 
Le numérique est au centre de nos stratégies. Notre langue est présente dans cet espace. La convergence entre le monde de l’édition et le monde Internet est irréversible. C’est pour cela que nous allons créer plus de contenus en français sur Internet et mieux utiliser la Toile et les outils numériques pour dynamiser l’édition francophone, apprendre, enseigner, développer les formations professionnelles en français comme le font déjà les universités libanaises, l’École supérieure des affaires et l’Agence universitaire de la Francophonie, avec ses campus numériques.

Qu’attendez-vous de la participation du Liban aux Jeux de la Francophonie de Nice en 2013 ? 

Les Jeux de la Francophonie à Nice en 2013 seront le grand rassemblement  de la  jeunesse francophone du monde entier autour d’une image modernisée et dynamique de la francophonie.
J’attends, au-delà de la participation du Liban, beaucoup d’expertise et d’expérience, puisque le Liban a magnifiquement organisé les Jeux de la Francophonie en 2009.
Et je souhaite évidemment bonne chance à tous les participants libanais !
 
 
D.R.
« Le Liban est l’exemple vivant d’une francophonie ouverte, dans un contexte plurilingue »
 
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