FEUILLETER UN AUTRE NUMÉRO
Mois
Année

2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
CHERCHER SUR LE SITE
 
ILS / ELLES
 
LIVRES
 
IMAGES
 
Au fil des jours...
 
Enquête
Maroun Nehmé : « Le Syndicat des importateurs de livres est le garant de la profession »


Par Fifi ABOU DIB
2009 - 01

En ce début d’année 2009, l’heure est aux bilans et aux perspectives. Éditeur et libraire, Maroun Nehmé est le président du Syndicat libanais des importateurs de livres, organisateur du Salon en coordination avec la Mission culturelle française. En observateur privilégié, il nous entretient de l’avenir du Salon et du rôle du Syndicat.

Quel bilan dressez-vous du dernier Salon du livre francophone de Beyrouth ?

On peut parler d’un bilan globalement positif. Le Salon 2008 a affiché 85 000 entrées et un taux d’achat d’au moins un livre par visiteur. Après trois ans d’interruption, ce qui suppose déjà une perte d’assiduité, on peut même parler d’un succès. On a pu critiquer l’impression de « vide » qui n’était due qu’à la générosité de l’espace. Mais il faut s’entendre sur le fait que ce Salon n’est pas supposé représenter une attraction pour badauds. En revanche, le travail de communication au niveau des écoles et des universités devrait se renforcer. On a constaté que ce sont souvent les enfants qui entraînent leurs parents à venir et non l’inverse. Les signatures des auteurs de jeunesse ont connu un vif succès. Il faudra également réfléchir à une communication directe auprès de professions libérales qui comptent de nombreux lecteurs. Par ailleurs, certains auteurs venus de France se sont trouvés un peu « largués ». Il s’agit en fait d’auteurs peu connus au Liban, dont la liste a été arrêtée et repartie par la Mission culturelle . Le syndicat devra, en 2009, se montrer plus vigilant à cet égard. Cela dit, ayant pris l’option d’un strict Salon du livre francophone et non plus d’un Salon « lire en français et en musique » comme cela se faisait les années précédentes, je pense que nous avons atteint un point de saturation. Pour avancer, il nous faudra donc trouver un élargissement qualitatif.

Quelles améliorations préconisez-vous pour cette année qui coïncide avec la proclamation de Beyrouth « capitale mondiale du livre 2009 » ? Qu’attendez-vous de la Mission culturelle française ?

En parlant « d’élargissement qualitatif », je pensais à une ouverture plus grande vers l’édition. L’idéal serait que ce Salon devienne un Salon d’importateurs ET un salon d’éditeurs, un salon plus professionnel . D’abord parce que le Salon du livre francophone au Liban doit dépasser sa réputation de « Salon de  consommateurs ». Le Liban est également « producteur ». Nous avons des maisons d’édition très actives, des auteurs de qualité, et nous faisons partie des plaques tournantes de la traduction. Il est nécessaire que ce Salon offre aux éditeurs libanais et étrangers une occasion de se rencontrer, d’échanger des projets, de coopérer entre eux. Par ailleurs, la présence d’éditeurs permettrait d’inviter des auteurs connus, ce qui apporterait du prestige à ce Salon déjà considéré, malgré son échelle et son marché réduit, comme le 3e de l’espace francophone. En ce qui concerne la Mission culturelle française, son rôle est évidemment primordial. D’abord, bien sûr, dans le financement de certaines opérations comme la prise en charge du déplacement et du séjour des auteurs invités ainsi que le catalogue du Salon. Ensuite, dans l’orientation et le conseil. Enfin, les sponsors apprécient l’engagement actif de la Mission.


La participation d’éditeurs arabophones est-elle envisageable et serait-elle profitable ?


Comme il n’est ni possible ni souhaitable d’unifier les deux salons francophone et arabe pour le moment , nous pourrions envisager une participation d’éditeurs de langue arabe, libanais bien sûr, mais aussi d’entreprises très actives dans le Machrek (Égypte, Émirats, Jordanie) et naturellement le Maghreb. Je considère que nous avons l’opportunité unique de faire évoluer notre salon en posant des critères de participation stricts, judicieux et objectifs. L’intérêt de faire participer les professionnels arabes réside, entre autres, dans la traduction. Il faut que certains livres puissent être proposés en plusieurs langues. Malheureusement, les traducteurs qualifiés sont rares, sans doute parce que ce secteur offre encore peu d’opportunités de travail. Nous nous devons de le dynamiser. Dans un pays comme le Liban où tout le monde est au moins trilingue, la découverte d’un livre dans une langue étrangère peut donner envie de le lire dans sa langue d’origine. Ces échanges sont un cadre idéal pour véhiculer les cultures et les idées, ils apporteraient ce qui manque singulièrement aux autres salons et manifestations culturelles du Liban.

Les dissensions au cœur du Syndicat des importateurs que vous présidez risquent-elles de perturber la bonne tenue du Salon l’an prochain ?

Le Syndicat des importateurs de Livres existe depuis plus de dix ans. Il a gagné des batailles essentielles, comme celle de la TVA, de la baisse des tarifs et des exemptions fiscales, dont tout le monde profite. Mais nous pouvons perdre ces acquis, et toutes les batailles futures, par manque de solidarité. Il est suicidaire que certains importateurs mécontents, tirant avantage de leur position dominante, se désolidarisent aujourd’hui de la profession alors que nous étions toujours à leurs côtés lorsqu’ils dirigeaient ce même Syndicat. L’organisation du Salon du livre francophone est désormais confiée au Syndicat qui fera de son mieux l’année prochaine pour accomplir sa mission en étroite coopération avec la Mission culturelle française et l’opérateur désigné. Le Salon est évidemment ouvert à tous les libraires, éditeurs ou organismes intéressés, qu’ils soient membres ou non du Syndicat. L’intérêt de la profession, que seul le Syndicat peut défendre, passe avant tout.


 
 
D.R.
 
2020-04 / NUMÉRO 166