Poésie
Jean-Michel Maulpoix : « Je fais des phrases avec les jours »
Par Antoine Boulad
2006 - 11
Avec ce nouveau volume de Poésie/Gallimard qui réunit Une histoire de bleu et L’instinct de ciel, Jean-Michel Maulpoix nous éblouit : son lyrisme, la beauté inouïe de sa parole sur la vie, sur la mer et sur l’amour réconcilieraient le plus impénétrable, le plus récalcitrant des hommes, avec la poésie, avec l’immédiateté de la poésie.
« Voilà longtemps que je rêvais d’un livre d’une autre sorte : récitation sous un préau d’école, conversation près de la lampe, lettre entrouverte, confidence où ce qui s’en va saurait parler de ce qui demeure... Un livre tout entier adressé. Une voix seulement. Que dirait-elle ? L’amour devenu mouvement de plume...
Il est arrivé, cet été, que le feuillage du grand tilleul troué de soleil tremble sur ma page d’écriture. »
Récitation, conversation, lettre, confidence : une voix ! Le lecteur s’aperçoit que le divorce consommé et historique de la poésie avec l’oralité n’était donc pas fatal ! Cette séparation de corps était donc révocable ! La parole vive pouvait donc couler sur la page ! L’amour pouvait donc faire le lit de la vie ! Â
« Je contemple dans le langage le bleu du ciel. »
Nul autre poète n’a su à ce point épouser le cours de sa pensée qui se confond elle-même avec le cours naturel des choses, avec les mots de tous les jours, d’une simplicité aussi nue que profonde.
Il est déconcertant d’ouvrir ce recueil à n’importe quel texte et d’y lire à chaque instant un recueillement, un retour permanent du poète sur lui-même, sans détours, comme si le mental avait été aboli, au profit d’une prose devenue poésie à force de couler dans le sens de la vie, de se mouler dans les choses dont elle parle. Il est merveilleux de découvrir la force d’évocation du lyrisme.
|