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Poème d’ici
Incendie


Par Ritta BADDOURA
2008 - 12

Ritta Baddoura est poète, critique et performeuse, née en 1980 au Liban. Détentrice d’un Mastère en psychologie, elle a suivi diverses formations en philosophie, musique, peinture et danse contemporaine. Son écriture a reçu plusieurs distinctions dont la médaille d’or en littérature aux Jeux de la Francophonie 2005, et en 2007 une bourse canadienne pour le théâtre (compagnies CEAD, TNM, et Wajdi Mouawad). Elle présente des performances caractérisées par l’improvisation et fondées sur la poésie, le mouvement et la voix. Son blog de poésie électronique Ritta parmi les bombes, créé lors de la guerre de Juillet 2006, est régulièrement mis à jour?: rittabaddouraparmilesbombes.chezblog.com

 

Incendie

Revenus ils brûlent derrière la fenêtre
Ils épargnent les rideaux

Un vent emporte la lune

Les soleils approchés sans fracasser mes lèvres
Là-haut je glisse sur le dos lisse de l’air

Étoiles courbées broutant le ciel
De bottes de boue les hommes bouchent les trous de la fin
Enfant longe les remparts adultes
Éparpille les étoiles ruminant la lumière

La pierre je respire
Bientôt un pays me poussera au profond des narines
En obstruant le souffle tu ne peux le détruire

J’expire ce ciment
Et dispose des pensées dures au creux du lit
Pour traverser le fleuve
Paradis de briques Que te sert de pousser une porte sans demeure

La pluie je l’entends qui crie sans tomber
Les nuages gros se dissoudre sans sucrer la nuit

À nos orteils danse le soleil toupie

Je lance mes yeux loin devant je cherche la forêt

Pourquoi es-tu si triste le jardin est à côté
La prison de verdure enrobe les branches

Jettes-tu les oiseaux par la fenêtre
Tailles-tu les arbres à l’image du fusil
Regard flétrit craque rétrécit chute de mon œil sur ma joue sur le drap

Mon pays est parole qui ne franchit la bouche
Mais la divise et ravale le cri blanc comme salive

Planètes tournoyantes roues chantant le grincement
Sombre substance qui avance

Tu empruntes la route ronde des lèvres
Lune ayant un soleil avalé
Trouée bouée brillante

Pays de pus referme ta bouche
Déroule le langage détartre la terre
Tu m’embrasses tu enfonces le soleil sous le char de la chair

Les pigeons voyageurs traversent la chaussée Pourquoi ne freines-tu pas ce feu de paroles
Nuit aveuglé par la nuit tu foules la lune confondue d’un pied léger

Je ne connais pas ce climat poseras-tu sur moi la cloche de verre

Sur le feuillage hygiénique mon sang imprime ta figure

Soulève ta cagoule lorsque tu tortures.

 
 
© C. Helmholz
 
2020-04 / NUMÉRO 166