Par Aïcha Arnaout
2013 - 05
Née à Damas le 13 octobre 1946, Aïcha Arnaout vit à Paris depuis 1978. La poète syrienne écrit en arabe et en français, et son œuvre poétique, publiée en Syrie, au Liban et en France, est traduite dans une dizaine de langues. L’écriture de Aïcha Arnaout explore les résonances entre intériorité et cosmos, de là découle sa singularité nimbée de pudeur, de bizarre et de mystère. Fragments d’eau et La Fontaine (avec Alain Gorius) ont paru chez al-Manar en 2003 et 2009.
*
Assise en lotus sur l’eau
les marées de mon sang
s’arrêtentÂ
mon Maître me dit :
rentre chez toi par ton nombrilÂ
assise dans la forêt
je deviens bois
« le vent ne change pas de direction »
*
Du temps
il ne reste à voir qu’un seul cheval
un cheval au galop
Tu oublies le visage
j’oublie le bois
et ne reste qu’un seul cheval
un cheval au galop
*
Tu avais à peine huit ansÂ
tu as mis ta couronne
une peau de gazelle
parchemin de ton carré magique
l’huile sacrée coulait
sur tes joues, tes tempes
mêlée au safran
depuis le temps des eaux
tu voulais disparaître
tout en étant présent
ta mère lavait nos gants
tu te croyais invisible
tu voulais nous surprendre
elle t’a regardé
t’a souri
puis
c’est elle qui a disparu
en nous laissant ses doigts
dans le tiroir des merveilles.Â
*
Tes plantes de pied brûlées
Entre deux infinis
Et tu n’es qu’à mi-chemin
Vers ce blanc vertige
Les dunes migratrices
Attisent les distances
Froissent les temps
Ne restera de toi
Qu’une ombre sans pas
Dans l’assonance des abîmes
Qu’un regard compacté
Dans la chair des mots
*
Plantée en toi
et ne puis être cueillie
Les noces de l’eau sont parcimonieuses.Â