Mon livre de chevet ? Mais c’est le Livre d’Ann-Colyn, bien sûr (réédité dans mes Œuvres poétiques complètes à Dar an-Nahar, 2004). Ce long chant d’amour en prose poétique qui, à travers les multiples nuances d’une passion quasi mystique (et pourtant combien charnelle), embrasse le fond des problèmes qui interpellent l’homme. Sa lecture est une fontaine de jouvence qui me protège de m’abîmer dans le temps. Avant, mes livres de chevet étaient interchangeables et variés, il y avait la Bible (pour sa langue plutôt que pour son contenu), puis les astrophysiciens (le souci de savoir d’où nous venons me tient à cœur depuis toujours). Ensuite, ce fut Nietzsche, Baudelaire, Valéry, Rindala…

Le besoin, maintenant avec l’âge, de me retrouver avec moi-même se fait fort, et je reviens à Ann-Colyn, « ce livre qui te fait sentir que l’amour se chante pour la première fois », selon les termes de Saïd Akl ; et Jacques Berque d’ajouter : « Ce formidable monument élevé au langage, ou bien à l’amour… où le poète célèbre l’univers à travers les sonorités des phonèmes arabes. » « Notre livre… le livre de l’amour », renchérit Ounsi el-Hajj. C’est ainsi que je le pratique aujourd’hui : expression bienfaisante de ma vie intérieure.