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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Beau livre
Du bleu plein les yeux


Par F. A.
2009 - 01
Devant l’œuvre commune d’un écrivain et d’un photographe, inutile de demander ce qui prime, du texte ou de l’image. Autant chercher à savoir ce qui, des paroles ou de la musique, fait le succès d’une chanson. Le genre, cultivé avec bonheur par des prédécesseurs illustres, comme Michel Tournier et Édouard Boubat, n’a pourtant pas vraiment fait école. C’est dire la difficulté de trouver la note bleue entre deux inspirations distinctes.

Dans cet album cependant, où les textes de Georgia Makhlouf viennent restituer en voix off la dimension invisible des photos de Joumana Jamhoury, on est en présence d’une coïncidence heureuse. D’emblée, les mots posés discrètement, comme en contrepoint des images, font surgir une troisième dimension. On est saisi d’une sensation de relief. Loin des cartes postales et des clichés éculés, le regard de Jamhoury sur la mer vue du Liban et inversement est souvent peu amène.

« Dans une photo, écrit Makhlouf, toujours deux choses, ce que l’on y voit et ce que l’on n’y voit pas. » Donnant donc « à voir et à savoir », les deux artistes s’amusent à prolonger les instantanés des villes maritimes du Liban. Byblos et son théâtre romain dont la courbe est reprise en écho par la baie. Chekka et ses usines aux formes arrondies, « cathédrales de tuyaux et de fer » auxquels répond plus haut une vraie cathédrale « faite de pierres et de chants ». Tripoli où « deux villes se regardent et font mine de s’éviter ». Sidon où  le château de la Mer est « un paisible témoignage de la pérennité des choses » alors que son pendant terrestre n’est qu’un « amas confus de ruines envahies d’herbes folles » qui confirme, selon l’écrivain, « la prééminence du marin sur le terrestre ».

On referme ce livre repu d’horizons texturés, tantôt bleus, tantôt gris ou blancs, tantôt flamboyants de couchants somptueux. Mais ce qu’on en garde est avant tout l’insaisissable de la mer : « Où va tout ce bleu lorsqu’on la prend dans nos mains ? » s’interroge Georgia Makhlouf. Voilà longtemps qu’on ne s’était plus posé la question.
 
 
 
BIBLIOGRAPHIE
Le Liban et la mer de Joumana Jamhoury et Georgia Makhlouf, Aleph, 191 p.
 
2020-04 / NUMÉRO 166