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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Le clin d'Å“il de Nada Nassar-Chaoul
La « prom »


2018 - 07
De votre temps, cela n’existait même pas. Pas seulement pour cause de guerre, mais parce que l’américanisation n’avait pas encore envahi votre vieux pays. On quittait l’école sous les quelques bombes du jour, accompagnées d’une vague attestation de « bonne conduite » et du regard sévère de la Mère supérieure qui vous recommandait surtout de ne pas oublier « les principes » inculqués par votre collège de jeunes filles bien sous tous rapports. Voilà pour la fête.

Aujourd’hui, dès les premiers jours de la classe de terminale, des conciliabules fiévreux occupent les élèves. Non pas – comme vous le pensiez bêtement – sur les sujets d’examens, mais sur le choix du lieu de la « prom » et de l’« after-prom ». Les hypothèses les plus ruineuses sont envisagées allant de l’hôtel cinq étoiles au complexe balnéaire ultra cher en vogue. Quant au choix de la « prom date », il donne lieu à maintes conspirations et stratégies tortueuses de la part des garçons pour choisir la fille la plus belle.

Les tenues à porter le jour J sont un autre casse-tête et les propriétaires de magasins, surfant, en bons Phéniciens, sur la vague, affichent désormais en grosses lettres sur leurs vitrines « Robes de prom », dans une tentative désespérée de fourguer les tenues longues strassées et pailletées en stock depuis des années. Reste encore, paraît-il, aux infortunés garçons à trouver un « bracelet de prom » à offrir le jour dit à leurs cavalières.

Ils n’en sont pas pour autant au bout de leurs peines. Car une « prom » qui se respecte nécessite une limousine. Pas moins. Et c’est dans cette voiture blanche hollywoodienne louée à grand frais que les « gradués » se pavaneront dans le quartier suscitant – c’est le but – l’envie de tous les voisins. Même les garderies s’y sont mises, organisant d’attendrissantes – mais lucratives – « graduation parties ».

Il n’y a pas à dire, on est une génération sacrifiée.
 
 
D.R.
 
2020-04 / NUMÉRO 166