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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Théâtre



Par Tarek Abi Samra
2016 - 11
Dans cette 23e édition du Salon du livre, le théâtre occupe une place de choix. Plusieurs événements lui sont en effet consacrés, dont une rencontre avec l’une des plus grandes figures du théâtre au Liban, Roger Assaf, qui présentera, en compagnie de Paul Mattar, le premier des deux volumes de son encyclopédie Le Théâtre dans l’Histoire, paru tout récemment aux éditions L’Orient des Livres.

«?Ce sera un moment assez fort du Salon, qui marquera une série de rendez-vous avec d’autres personnalités du théâtre comme Enzo Cormann, Kossi Efoui, Mohamed Kacimi et Olivier Saccomano?», affirme Éric Lebas, l’attaché culturel de l’ambassade de France/Institut français. Il ajoute à propos de cette rencontre avec Assaf?: «?C’est un événement que nous attendons avec impatience et dont nous avons eu les prémices l’année dernière.?»

En effet, Assaf avait déjà présenté son ouvrage (en cours de préparation à l’époque) lors du Salon précédent en novembre 2015, et il nous avait accordé à cette occasion un bref entretien dans lequel il s’expliqua sur les deux idées maîtresses qui sous-tendent son encyclopédie. En premier lieu, Assaf critique la conception selon laquelle l’art dramatique «?aurait une histoire unique, une histoire logique avec un seul début et une seule évolution qui engloberait toutes les formes théâtrales, allant des plus primitives aux plus complexes?». Il existerait plutôt «?des théâtres multiples, des étapes que j’appelle des temps.?» Il poursuit?: «?Ces temps sont le plus souvent autonomes, indépendants, ayant chacun sa vie propre. Ce sont des formes tout à fait différentes, qui ne ressemblent pas au théâtre occidental.?» C’est pour cette raison qu’il traite chacune de ces formes à part?: ainsi, dans ce premier volume de l’encyclopédie qui dresse une fresque immense allant de l’Antiquité égyptienne et babylonienne jusqu’à l’ère élisabéthaine, on retrouve, à côté de chapitres sur la tragédie grecque ou la commedia dell'arte, d’autres consacrés à des formes dramatiques souvent méconnues du monde arabe et de l’Extrême-Orient, comme le théâtre d’ombres, le zaju chinois et le nô japonais.

La seconde idée directrice découle de la première et consiste à proposer une vision qui dépasse «?l’hégémonie du théâtre occidental.?» Comme il l’explique dans l’introduction de son ouvrage emblématiquement intitulée «?Prélude à une “non-histoire” du théâtre?», on a souvent recours à un modèle unique pour définir ce qu’est le théâtre?: c’est celui qui a dominé en Europe depuis le XVIIe jusqu’au XIXe siècle. Ainsi, selon Assaf?: «?La “scène à l’italienne”, le mimétisme illusionniste et la dramaturgie classique ont trop longtemps dominé sans rivaux le théâtre dans le monde pour ne pas conserver une forte autorité dans l’enseignement du théâtre (…) et dans la pratique coutumière du lecteur ou du spectateur ordinaire.?» Mais d’après Assaf, le théâtre ne se réduit pas à un univers fictif coupé du monde, conçu par un auteur, régi par un metteur en scène et incarné par des acteurs sur une scène rectangulaire séparée du public. Effectivement, beaucoup de pratiques théâtrales relevant de cultures et d’époques différentes contredisent cette formule. Selon l’auteur, la redécouverte de ces formes anciennes (surtout celles de l’Asie) a joué un rôle primordial dans la remise en cause du théâtre occidental au XXe siècle.

Un double objectif est donc à l’origine de ce travail colossal?: élargir la définition de ce qu’est le théâtre, et revaloriser de la sorte des pratiques dramaturgiques qui ne correspondent pas à cette vision restrictive.

Une autre table ronde aura lieu autour de l’ouvrage d'Olivier Saccomano, Le Théâtre comme pensée, paru cette année aux éditions Les Solitaires intempestifs. Dans cet essai basé sur une thèse de doctorat, le dramaturge et metteur en scène Saccomano mène une réflexion sur le rôle de la pensée dans le théâtre et essaie de déterminer les conditions spécifiques qui permettraient à cette forme artistique de tenir un discours de vérité.

D’autres personnalités du théâtre seront aussi présentes au Salon, parmi lesquelles les deux dramaturges Kossi Éfoui (Togo) et Enzo Cormann (France). Mentionnons également l’auteur algérien de romans et de pièces de théâtre Mohamed Kacimi qui, en 2008, avait écrit, en collaboration avec la comédienne Darina al-Joundi, Le Jour où Nina Simone a cessé de chanter, une sorte de mémoires qui seraient plus tard adaptés au théâtre et dans lesquels l’actrice raconte son expérience de la guerre civile libanaise. Enfin, l’écrivain Nabil Dagher présentera sa pièce dernièrement parue aux éditions L’Harmattan et qui relate les dernières heures de Gibran Khalil Gibran?: Vers la lumière, le prophète face au miroir. 

Voici donc un programme riche?: comme l’affirme Éric Lebas, cette année, «?le Salon ne fait pas seulement son cinéma?; il fait aussi son théâtre.?»

BIBLIOGRAPHIE

Le Théâtre dans l’Histoire de Roger Assaf, L’Orient des Livres, 2016, 600 p. 
Le Théâtre comme pensée d’Olivier Saccomano, Les Solitaires intempestifs, 2016, 368 p.
Vers la lumière, le prophète face au miroir de Nabil Dagher, L’Harmattan, 2016, 62 p.

Le Théâtre au Salon
Table ronde autour du Théâtre dans l’Histoire avec Roger Assaf, Wajdi Mouawad et Paul Mattar, le 5 novembre à 18h (Agora)/ Signature à 19h (L’Orient des Livres)
 
Table ronde autour du Théâtre comme pensée avec Roger Assaf, Oliver Saccomano et François Berreur, le 10 novembre à 18h (Amphi Gibran)/ Signature à 19h (L’Orient des Livres)
 
Conférence-Lecture : « Gibran, lumières sur l’homme » avec Nabil Dagher et François Berreur, et des lectures d’extraits de Vers la lumière, le prophète face au miroir, le 11 novembre à 15h30 (salle RDC)/ Signature à 17h (Antoine)
 
 
 
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