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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Par Fifi Abou Dib
2015 - 11
Né à Beyrouth en 1946, Gérard Salem a une enfance quelque peu nomade. Sa famille se déplace au gré des affaires paternelles et des circonstances, de Beyrouth à Khorramchahr puis à Téhéran. À la mort de son père, il est envoyé à Lausanne, à 13 ans, dans un pensionnat où se confirme sa passion pour la littérature. Devenu psychiatre, il fait autorité dans la thérapie familiale dont il est l’un des pionniers, ainsi que l’hypnothérapie. Grand voyageur, Salem cultive aussi un attachement pour la Chine et parle couramment le mandarin.

Ces éléments éclairent le «?premier roman?» de cet auteur de 69 ans qui par ailleurs n’a jamais cessé d’écrire, publiant d’innombrables essais, nouvelles et articles spécialisés au fil de sa longue carrière. 

Salem innove en imaginant pour Marc de café une suite de vingt-sept nouvelles, ensemble de fragments qui, bout à bout, à travers des souvenirs lumineux, constituent une autobiographie. Organisés selon le rituel oriental de la voyance dans le marc de café, ces petits récits commencent justement par la technique de lecture du marc, telle qu’enseignée par une amie de la mère du narrateur, tante Margot. D’abord, après avoir fini de boire, couvrir la tasse et lui imprimer un léger mouvement circulaire?: «?Ouverture?». Ensuite, approcher la tasse de ses yeux?: «?De près?». Et puis laisser reposer un instant?: «?Intermède?». Pour la deuxième donne, reprendre la tasse et l’observer de loin en plissant les yeux?: «?De loin?». Tirer enfin les conclusions qui s’imposent?: «?Envoi?». Voici donc les cinq parties, sans compter la «?Dernière touche?», de cette saga familiale qui se déroule entre Orient et Occident, de 1915 à 2015. Du joug turc au génocide arménien, des nombreux déplacements en Orient à la vie lausannoise, de l’art d’être petit-fils à celui d’être grand-père en rejouant sa propre enfance, Salem, conteur né, vous arrache rires et larmes, parfois en même temps. Le médecin en lui s’invite entre les lignes, émaillant du vocabulaire de la Faculté des pages qui pourraient être des palimpsestes de Céline, notamment quand ce dernier s’appesantit sur l’observation des agonies. Les morts successives des anciens et l’effondrement des mythes de l’enfance sont évoqués dans une écriture qui sourit doucement. On l’aura compris, la famille, dont le modèle de plus en plus dysfonctionnel est au cœur des travaux de l’auteur, fait ici l’objet d’une apologie à la fois tendre et mordante et ne laisse d’autre choix que de l’aimer.



Gérard Salem au Salon
Table ronde «?Le cercle vicieux des identités communautaires?», le 24 octobre à 16h (Salle RDC)/ Signature de Marc de café à 17h (stand Suisse)

Signature de Marc de café, le 27 octobre à 18h (stand Suisse)
 
 
D.R.
La famille fait ici l’objet d’une apologie à la fois tendre et mordante
 
BIBLIOGRAPHIE
Marc de café de Gérard Salem, éditions L’Âge d’Homme, 2015, 224 p.
 
2020-04 / NUMÉRO 166