Editorial
Le loup dans la bergerie
Par Alexandre Najjar
2014 - 08
La région est à feu et à sang, avec les attaques
aveugles contre Gaza, l’avancée de l’État islamique en Irak, l’exode des
chrétiens de Mossoul, la poursuite des combats en Syrie, tandis que nos
dirigeants font tranquillement bronzette ou se remplissent les poches.
Les crises au Moyen-Orient ? Tout cela est loin ! La présidence de la
République ? Elle peut attendre. La correction des examens officiels ?
Point d’urgence. La crise économique ? Y a pas l’feu. Les milliers de
réfugiés syriens ? Ils ne sont que provisoires ! Avec leur excès de zèle
habituel, nos valeureux députés envisagent même, le plus sérieusement
du monde, de proroger encore une fois leur mandat, au mépris d’une
Constitution censée constituer le socle de notre prétendue démocratie.
Et voilà que le Liban se réveille un beau matin avec le loup dans la
bergerie. À Ersal, à Tripoli, l’armée libanaise se retrouve tout à coup
confrontée à des bandes de « takfiristes » aux abois, au milieu de
tensions confessionnelles qui risquent de nous plonger dans une nouvelle
guerre civile. L’incurie de nos dirigeants n’a d’équivalent que
l’indifférence de ce qu’on appelle « la communauté internationale » qui
assiste au chaos sans réagir, soit que cette situation lui convienne
(les loups entre eux), soit qu’elle ne comprenne pas l’utilité d’une
intervention pour circonscrire l’incendie. Or, chez nous comme Ã
l’échelle planétaire, cette démission et ce manque de discernement
risquent de coûter cher. « Lorsque l’on déchaîne un monstre, on finit
par être emporté par lui », a justement rappelé Walid Joumblatt. Qui est
le plus coupable, le pyromane ou celui qui, les bras croisés, regarde
le feu se propager ?
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