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Editorial
Marée noire


Par Alexandre Najjar
2014 - 07
L’extrémisme sunnite qui sévit en Irak et en Syrie n’est pas né ex nihilo : il est la créature de puissances régionales qui l’utilisent comme force de frappe pour servir leurs intérêts ; il est noyauté par la dictature qu’il prétend combattre dans le but de diaboliser la résistance ; il s’est développé pour contrer l’extrémisme chiite soutenu par l’Iran. Il constitue désormais un fléau qui échappe au contrôle des apprentis sorciers qui l’ont créé et qui menace de mettre à feu et à sang le Moyen-Orient tout entier, en exécution d’un plan élaboré depuis longtemps par ceux qui cherchent à émietter la région et à reconsidérer les frontières dessinées par les accords Sykes-Picot. Non contents de procéder à une épuration religieuse, qui balaie à la fois chiites et chrétiens, les islamistes s’en prennent aux symboles mêmes de la culture. En déboulonnant à Mossoul la statue du poète Abou Tammam, après avoir brisé le monument consacré à Abou el-Ala’ el-Ma'ari à Idlib en Syrie, ces combattants se placent ostensiblement dans le camp des obscurantistes. La marée noire qu’ils font déferler sur le Levant, et que l’Occident contemple avec complaisance ou impuissance, ne constitue pas seulement une menace militaire : elle représente aussi un danger idéologique qui sape les assises de la civilisation arabe. Comme toujours, le Liban est victime de cet extrémisme qui, par le biais de ses terroristes, a semé la panique en ville et pourri l’été. Certains maires zélés, animés par des pulsions intégristes, ont même interdit aux cafés et restaurants locaux de servir des repas durant le jeûne du Ramadan – foulant ainsi aux pieds les traditions qui régissent notre société. Pour contrer ce courant liberticide, le courage des forces de l’ordre ne suffira pas. Il nous faudra faire preuve de solidarité, d’unité, et mettre au placard nos préjugés et nos rancunes pour défendre bec et ongles le vivre-ensemble qui fonde notre identité. Car l’obstination de la coexistence est encore la meilleure réponse à ceux qui veulent la guerre.


 
 
 
2020-04 / NUMÉRO 166