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Essai
Max Gallo : les confessions de Charlemagne
Académicien, historien et romancier, Max Gallo nous livre une biographie d’un genre nouveau.

Par Lamia el-Saad
2016 - 04

Il avait déjà touché à tout… ou presque… Autobiographie, romans, suites romanesques, ouvrages politiques, fictions, essais, ouvrages historiques, biographies, récits…

Voici une biographie qui n’en est pas une ; écrite à la première personne… par Charlemagne lui-même ! Vers la fin de ses jours, ayant pressenti une mort prochaine, il aurait éprouvé le besoin de faire le bilan de ses 46 ans de règne afin d’être en paix avec sa conscience et de se préparer à comparaître devant Dieu. Il aurait donc confié les principaux actes de sa vie à un jeune et talentueux clerc prénommé Eginhard. C’est ce récit imaginaire et palpitant que nous livre Max Gallo.

Roi belliqueux, il justifie ses guerres par le fait qu’elles furent principalement menées contre des peuples païens… contre les Avars (peuple barbare descendant des Huns) qui crucifiaient les prêtres aux portes des églises… mais aussi, et surtout, contre les Saxons qui « pratiquaient le culte des démons (…) et ne voyaient rien de déshonorant à violer ou transgresser les lois divines ou humaines ». Si Charlemagne eut toujours le sentiment d’être au service de Dieu, il n’en demeure pas moins que le souvenir des quatre mille cinq cents têtes de Saxons tranchées à Verden vint hanter ses nuits jusqu’à sa mort. 

Toutefois, le chef des Saxons, Widukind, lui avait échappé et s’était réfugié au Danemark. Charlemagne lui écrivit pour lui offrir le pardon de toutes ses fautes passées, la paix et le baptême. Plus encore, la proposition ayant été acceptée, il fit à son pire ennemi l’honneur d’être son parrain, se liant ainsi à lui par une relation des plus privilégiées. Montesquieu écrit à son sujet : « Charlemagne savait punir ; il savait encore mieux pardonner. »

Le butin de ses guerres n’était pas un quelconque trésor, mais de « nouveaux chrétiens ». Toutefois, le temps révéla que certains de ces convertis n’adhérèrent pas véritablement à la religion chrétienne et continuèrent à vénérer secrètement leurs idoles.

Charlemagne sut rectifier le tir et prendre la mesure qui s’imposait. Il était nécessaire d’instruire une population analphabète, donc incapable de lire et de comprendre l’Évangile. « La science d’écrire étant faible », il était à craindre que « l’intelligence des Saintes Écritures ne fut moindre » que ce qu’elle aurait dû être. Il ne fut pas long à faire connaître sa volonté de roi : « Que les ministres de Dieu attirent auprès d’eux, non seulement des gens de condition servile, mais les fils d’hommes libres (…) qu’il y ait des écoles de lecture pour les enfants. Que les psaumes, les notes, le chant, le calcul et la grammaire soient enseignés dans tous les monastères et les évêchés. » Le moine Alcuin joua un rôle essentiel dans la réalisation de ce grand projet. 

Après avoir tout entrepris pour que les païens convertis deviennent d’authentiques chrétiens, il réussit à faire de tous les peuples qu’il avait conquis et rassemblés un Populus Christianus… si bien que lorsqu’il combattit « les infidèles » en Espagne, ses « fidèles Saxons » luttèrent à ses côtés.

Roi chrétien, Charlemagne fut le protecteur des pèlerins qui se rendaient en Terre sainte ; ce privilège lui ayant été accordé par le calife de Bagdad, Hâroun al-Rachid, qui lui faisait dire par ses envoyés qu’il préférait son amitié « à celle de tous les rois et princes de la Terre ». 

Sensible au sort des plus pauvres, il ne cessa d’agir pour « le triomphe de la charité et de l’équité ». Max Gallo nous fait pénétrer dans la sphère intime de l’empereur à la barbe fleurie, et nous décrit un homme aimant passionnément les femmes, la chasse et la natation, un époux plusieurs fois endeuillé, un père inconsolable du décès de ses enfants mais qui accepte la volonté de Dieu.

Les moments clés de sa vie nous sont relatés, comme le serment de son père de « délivrer le pontife et la République romaine de la menace des Lombards ». Charlemagne ira encore plus loin et sera « le défenseur dévoué de la Sainte Église et son auxiliaire en toutes choses », ce qui lui vaudra d’être couronné empereur d’Occident, à Rome, par le pape Léon III, le 25 décembre de l’an 800.

En abordant le règne de Charlemagne sous un angle inédit, Max Gallo réussit un remarquable travail de vulgarisation et nous propose un ouvrage accessible à tous. Certes, l’essentiel y est. Toutefois, ce récit est loin d’égaler les imposantes biographies de Charlemagne par Jean Favier et Arthur Kleinclausz… de même qu’il demeure très en-dessous des autres biographies et ouvrages historiques de Max Gallo.

 
 
D.R.
 
BIBLIOGRAPHIE
Moi, Charlemagne, empereur chrétien de Max Gallo, XO éditions, 2016, 185 p.
 
2020-04 / NUMÉRO 166