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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Essai
D'une guerre à l'autre


Par Samir Frangié
2015 - 01
L’implication du Liban dans la guerre de Syrie est l’histoire d’une nouvelle descente aux enfers qui commence en 2012 avec l’annonce par le Hezbollah de sa participation à la bataille de Qousseir en Syrie. Son auteur, Antoine Haddad, professeur d’université et membre fondateur du Mouvement du renouveau démocratique, connaît bien son sujet. Il note avec beaucoup de justesse les effets désastreux de cette intervention qui constitue une première dans l’histoire des guerres libanaises jusque-là marquées par les interventions des pays voisins dans nos conflits internes. Pour une fois, les Libanais ne subissent pas mais interviennent eux-mêmes dans les conflits qui se déroulent chez leurs voisins.

Cette intervention, affirme Haddad, a eu pour premier effet d’affaiblir l’État qui devient de plus en plus incapable d’assurer le fonctionnement de ses institutions et leur renouvellement comme en témoignent la non-élection d’un président de la République, la prorogation du mandat du parlement, l’échec des tentatives d’adoption d’une nouvelle loi électorale ou encore l’affaire des soldats pris en otages par les islamistes syriens.
Plus grave, l’armée, jusque-là préservée, se retrouve partie prenante d’une guerre qu’elle n’a pas choisi de mener et dont elle doit payer le prix.

L’auteur note, en parallèle à cette déliquescence de l’État une montée des tensions communautaires entre sunnites et chiites marquée notamment par les affrontements de Saïda en juin 2013, les attentats à la voiture piégée dans la banlieue et à Tripoli, l’attaque menée par un commando-suicide contre l’ambassade d’Iran… Cette montée des tensions se greffe sur une véritable guerre civile qui ravage déjà la Syrie, l’Irak et le Yémen.

Le calme précaire qui règne aujourd’hui ne signifie pas que le Liban est sorti de la zone des tempêtes. Seule l’élection d’un nouveau président de la République permettrait de dire que le Liban se trouve désormais relativement à l’abri. Encore que, comme l'observe très bien l’auteur, le pays, s’il n’est pas menacé à court terme par une explosion de violence, doit affronter les dangers d’une mort lente tant au niveau de son économie qu’au niveau de ses institutions et notamment de son administration.
Il se dégage de la lecture de l’ouvrage une impression oppressante, celle de revivre des épisodes d’un passé qu’on croyait définitivement enterré et celle aussi d’être condamné à répéter indéfiniment les mêmes erreurs. Seules les appellations ont changé. Nous avons passé d’une « résistance libanaise » à dominante chrétienne, à une « résistance nationale » à majorité musulmane pour arriver à une « résistance islamique » exclusivement chiite. Trois expériences qui se terminent de la même manière… par des « guerres d’extermination », entre chrétiens pour la première, entre chiites et Palestiniens pour la deuxième et entre Libanais chiites et Syriens sunnites pour la troisième.

Un livre intéressant qui aide à réfléchir sur l’impasse dans laquelle se trouve le pays et sur la crise que traverse la politique au Liban désormais principalement axée sur les moyens de préserver le statu quo.


 
 
Le calme précaire qui règne aujourd’hui ne signifie pas que le Liban est sorti de la zone des tempêtes.
 
BIBLIOGRAPHIE
 
2020-04 / NUMÉRO 166