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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Poème d’ici
Cinq poètes syriennes
Les Fruits de l’obscurité, micro-recueil paru fin 2018, met à l’honneur cinq poètes syriennes de différentes générations, nées entre 1967 et 1988 et vivant aujourd’hui en exil (l’Allemagne pour toutes sauf pour F. Souleimane décédée en France en 2017). Les feuillets rouges présentent les poèmes de Lina Atfah, Rasha Habbal, Maha Becker, Widad Nabi et Fadwa Souleimane. Ces poèmes ont été lus le 24 décembre 2017 dans l’appartement de Maha Becker, lors d’une soirée sororale dédiée à la mémoire de Fadwa Souleimane. Cette lecture a été retransmise en direct sur Radio O, station célébrant l’oralité du poème, avant de paraître chez L’Atelier de l’Agneau.

2019 - 02
Personne ne lit la poésie de bon matin
L’oiseau quitte son nid pour prendre une photo avec les fils barbelés de la frontière
L’amant pose sa tête sur la rouille d’un banc à la gare et pense à la main de son aimée restée oubliée au fond de sa poche
Le soldat emplit la ville de la poussière de ses bottes militaires
Alors que la poésie prend l’escalator avec moi pour s’isoler…
Souriante.
Widad Nabi

*

- Que fait la langue ?
- Elle te tend un miroir pour que tu voies ta solitude dénudée du vacarme
- (…) Que faire des nuages ?
- Fixe-les du regard jusqu’à ce qu’ils deviennent pluie
- (…) Que faire du temps ?
- Egraine-le tel une grenade 
- (…) Pourquoi les poètes meurent ?
- Pour mettre leurs noms à l’épreuve de l’immortalité
- Pourquoi les despotes meurent ?
- Pour que les peuples vivent.
Lina Atfah

*

J’entends des arbres maintenant lire de la poésie…
Mes branches se sont élevées…
Et une femme de mes racines prépare des gâteaux pour la tristesse…
Je lis son avenir dans la paume de ma main…
Bourgeon solitaire…
Et pourquoi j’achète toujours l’attente d’hommes qui ne m’aiment pas ???
Comme le poème je donne mes fruits dans l’obscurité…
Maha Becker

*

(…) Je n’ai pas plus de temps pour nous pardonner notre mort, nous les morts-vivants
Mais il me reste un peu de temps pour pardonner à ceux qui se sont endormis dans l’obscurité du tombeau et nous ont laissé dans l’attente d’une mort se délectant de notre mort lente

Fadwa Souleimane

*

(…) Le sais-tu ?
Ton souffle est réel comme l’imagination
Car seule l’imagination marie un fleuve à un fleuve
Et s’enfuit les emportant loin du massacre
Rasha Habbal

Traduits de l’arabe par Ritta Baddoura
 
 
D.R.
 
2020-04 / NUMÉRO 166